Come fly with me

Reprendre l’avion après quasiment 2 ans d’interruption forcée.
Voyager pour la première fois dans LE pays numéro Un au monde, qui me révulse autant qu’il me fascine.
Tout cela ressemble à un redémarrage de la vie intense d’avant…

Touvofaire l’americano ?

J’ai passé 5 ans sur les routes et dans les airs à voyager en Europe de l’ouest pour mon précédent métier, consultant SAP.

Durant cette période que je qualifierai d’expérience de terrain, j’ai appris une autre réalité, en premier lieu celle des usines agro-alimentaires.

Quand on travaille dans l’optimisation des flux logistiques, rien ne remplace le terrain.

C’était une période exaltante mais aussi fatigante. A la longue, je me suis lassé de ces trajets incessants et de cet état : en permanence sur la brèche.

Je me suis fait embauché par l’avionneur européen et sur ce, la pandémie de Covid-19 nous est tombée dessus.

Tous les jours à la maison :
Pour un recentrage, on ne pouvait pas faire plus radical !

Cette longue période d’état semi-végétatif pour la population mondiale est une occasion unique de se poser et de s’interroger sur l’essentiel dans notre vie.

Ce matin en reprenant l’avion, en retrouvant les réflexes un peu rouillés du passage de la sécurité, je réalise que le voyage fait partie inhérente de ma vie.

Saint Christophe, patron des voyageurs, on ne se refait pas, n’est-ce pas ?

La correspondance à Munich est tendue. Peu de temps pour attraper le vol pour Washington, il ne faut pas trainer. Mais en plus, on ne pénètre pas sur le sol américain sans montrer patte blanche.

  • La queue pour passer la douane, check.
  • La queue pour les formalités US, oooh elle est longue.

Quand le grand monsieur allemand préposé au contrôle m’apprend que j’ai pris la mauvaise file tandis que mon vol a commencé à embarquer, je commence à stresser bien sérieusement cette fois.

Finalement on finit par la passer cette dernière étape et une fois mes fesses confortablement installées dans la Business Class de United Airlines, je me détends pour de bon.

Etrange comme l’on passe parfois rapidement du stress intense à la plénitude.
Je me souviens alors ce qui m’a amené dans la classe affaires de la vie professionnelle :
la capacité à me remettre en question et à ne pas choisir la voie la plus facile, l’ambition de toujours progresser et d’être le plus utile pour mon employeur / mon client.

Rien n’est gratuit dans cette vie.

On-board

Et maintenant direction, les States yeah.
Ce vol transatlantique est un bon moyen de sauter à pieds joints dans cette culture bien plus subtile qu’il n’y parait.

Il n’y a aucun pays au monde qui suscite des sentiments si contradictoires en moi.
Le fan de cinéma est tellement reconnaissant à cette terre d’accueil qui a donné l’occasion aux réfugiés de la Mitteleuropa de réaliser certaines des plus belles œuvres artistiques de l’histoire de l’humanité. L’âge d’or d’Hollywood était essentiellement l’œuvre d’artistes européens, pour beaucoup juifs, qui avaient quitté l’horreur du nazisme dans les années 30.

Et je ne parle pas de la musique noire américaine, Ray Charles i tutti quanti …

Disons-le tout net, je suis un enfant de la culture américaine.

En même temps, le jeune homme biberonné au Monde Diplomatique que j’ai été, connait trop bien l’impérialisme américain pour prendre le pays le plus puissant au monde pour des enfants de chœur.

Bêtement j’ai regardé la veille de mon départ l’enquête sur le rachat forcé d’Alstom par les américains de General Electric.
Pour faire vite, on apprend comment la justice extraterritoriale des Etats-Unis lui permet de faciliter le rachat d’entreprises étrangères stratégiques par ses propres groupes nationaux.
La prédation économique à l’état pur.
On y voit un dirigeant français appréhendé par surprise par le FBI dès sa sortie de l’avion sur le territoire américain. Il passera 2 ans en prison, en tant qu’otage de la guerre économique que les Etats-Unis ont exercé envers la France …

Ça m’a un peu refroidit je dois dire.

Dans l’avion, je fais des choix plus judicieux en choisissant le meilleur des USA, d’abord un concert filmé de Bob Dylan en 1980, puis la famille Tenebaum de Wes Anderson.

J’ai dans la main gauche mon Coca Cola, dans ma main droite mon Pinot Noir.

Ça y est moi aussi je peux dire, I am an american.

Step into my world

J’apprécie énormément de pouvoir travailler avec des étrangers. Je trouve que c’est une chance immense.

Le monde professionnel et tous les codes qu’il charrie, sont une excellente manière de venir à la rencontre d’autres cultures, d’être traversé par elles et souvent de faire trembler nos certitudes.

Pour aller vite, on peut qualifier l’américain de pragmatique.

Straightforward, un mot qui me plait beaucoup en anglais.

En gros, tout ce qui est simple et efficace lui convient.

Sur ce plan, je me sens beaucoup plus chez moi ici dans le Nouveau Monde que dans ma vieille Europe. Parfois mes congénères français ou allemands ont une manière de se couper les cheveux en quatre qui m’épuise.
Ici j’apprécie le côté direct et familier de nos rapports, plus la rapidité des prises de décision, ça me convient très bien.

Un autre angle d’attaque pour étudier un pays est le comportement sur la route.

Sur ce plan-là, l’américain est plutôt discipliné et prévisible. Des qualités très appréciables au volant.

Voici une anecdote intéressante à ce sujet, aux US il n’y a pas de rond-point. A chaque intersection sans feu, une règle du « check réciproque » s’applique : chacun s’arrête systématiquement avant de rentrer dans un croisement, s’il y a plusieurs voitures c’est le premier arrêté qui traverse le carrefour mais il ne s’engage qu’après avoir contrôlé les autres.

Mine de rien ce petit exercice qui s’applique à chaque fois que l’on conduit (c’est-à-dire tout le temps aux US), nous oblige à être en connexion les uns avec les autres.

Bon sinon j’ai eu un peu de mal au début avec le tank qu’ils m’ont proposé comme voiture de location. 
« Euh, vous n’avez pas plus petit ? »

Mais finalement on s’y fait très vite.

En réfléchissant, je me dis que décidément l’Homme s’habitue à tout.

Combien de temps me faudrait-il pour rentrer dans le moule américain ?

Enfin le moment tant attendu arrive : le week-end !

It’s Friday again …

Nos collègues américains nous amènent dans une micro-brasserie locale pour goûter des bières du cru.

Ma parole, elles sont excellentes.

J’avais entendu parler du succès des craft beers américaines mais j’avais quand même un doute sur la qualité réelle de leur production.

Les doutes sont balayés dans les rires de la joyeuse troupe qui apprend à se découvrir sous un jour plus personnel que l’angle professionnel.

Micro brasserie en Virginie

Le samedi, le programme est à la visite de la capitale fédérale, Washington D.C.

Le musée de l’Air et de l’Espace inspire toute la passion des milliers d’ingénieurs anonymes qui ont rendu possible ces exploits de la conquête des airs.

Ici on parle aussi bien des avions que des fusées et des satellites.

Je reste immobile plusieurs minutes et extatique devant les photos prises par le télescope spatial Hubbles.

Aucun peintre aussi doué soit-il n’arrivera à égaler la folie du cosmos.

Étoile en fin de vie

La course à l’Espace entre les États-Unis et l’Union Soviétique pendant la Guerre froide est aussi largement évoquée et représentée.
Y compris un passage méconnu de cette période troublée, une trêve entre les 2 géants en 1972, qui les vit collaborer sur un projet spatial commun.

Ce musée est just too much, on a l’esprit qui tourne, étourdi par tant d’informations et de sensations.

J’en retiens en synthèse la passion nécessaire à l’expression du génie humain.

Et je repense en contre-point à cette phrase tellement stupide d’une dirigeante écologiste française, « les enfants français ne devraient plus rêver d’aéronautique de nos jours »

Choc des cultures.

The happy few

Georgetown est le quartier historique de « D.C. ». Sur cette colline, les maisons de style anglais, époque victorienne, sont colorées et fouettées par les feuilles des arbres.

C’est l’automne, c’est beau comme tout.

Je ne m’imaginais pas les USA comme cela.

Évidemment nous sommes dans un petit quartier hyper-privilégié qui ne représente pas l’immensité de ce pays.

Mais tout de même, c’est toujours intéressant quand la réalité vient bousculer nos idées préconçues.

Au bout de la colline, se trouve le symbole ultime de cette élite : l’université et ses Hoyas.

Déjà de base j’aime bien le concept de campus d’une université américaine.

Le cinéma et les séries nous ont abreuvé de cette imagerie si cool de la meilleure période de la vie.

Mais là, imaginez en plus que vous placez cette petite ville dans la ville au sommet d’une colline qui domine la rivière Potomac et que vous l’équipez de superbes bâtiments historiques dignes d’Harry Potter …

En plein centre du campus, au milieu des bâtiments, une pelouse remplie de pierres tombales donne une ambiance spooky surprenante.

Je sens les étudiants qui me croisent irradier de bien-être. Les bandes de filles rient entre elles.

Université Georgetown

Le dimanche, nous déroulons un programme contrasté : visite d’un parc naturel le matin (Great Falls) et après-midi Shopping dans un centre commercial.

Le dernier jour, les sentiments ambivalents se disputent mon cœur.

Le dernier petit-déjeuner à l’hôtel est un concentré de ces contradictions au sein de ce pays autant admiré qu’honni.

La TV rediffuse les meilleurs moments d’un Show passé, la soirée des patriotes américains. Les meilleurs rejetons de l’Oncle Sam de l’année sont décorés.

Ensuite le dernier rebondissement du procès d’un crime raciste occupe une bonne partie du journal.

Business as usual in America.

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